NOTRE HOMMAGE : Avant de rencontrer Camille Piaton, je n’avais jamais rencontré de pirate… des pirates informatiques, oui… des pirates en mer de Chine, oui, hélas… Mais une pirate psychique, jamais.
Je comprends désormais pourquoi les clients s’arrachent ses magnifiques sièges qui ressemblent à d’immenses amulettes protectrices dans lesquelles on pourrait s’asseoir pour un voyage dans la quatrième dimension, dans la préhistoire, dans un conte de fées, dans un nid-d’oiseau ou dans une boîte à bijoux…
Pourquoi pirate psychique, vous demandez-vous ? Car elle a l’allure d’une flibustière hollywoodienne avec ses cheveux bruns, ses grands yeux profonds, ses pommettes hautes et ses lèvres aussi faites pour le sourire que ses dents pour mordre ses ennemis, mais surtout, car ses pensées artistiques partent à l’abordage des vôtres quand vous lui parlez. En effet, j’étais dans son atelier d’Anglet depuis moins de cinq minutes que je la voyais déjà se dédoubler devant moi, comme quand vous êtes chez le coiffeur, face au miroir, et que vous voyez dans le reflet de celui qui se trouve derrière vous, votre image se démultiplier à l’infini.
Je me suis dit un moment qu’elle avait peut-être utilisé un solvant, une colle ou un autre produit chimique pour créer ses éléments de mobilier qui touchent plus à l’art qu’à la simple création, mais non, aucune odeur dans la pièce… Rien.
Camille me parlait de sa vie, du moins de son changement de vie : de son ras-le-bol de Paris, de son ras-le-bol de son job pourtant bien payé dans la communication et l’événementiel, de la rencontre qui lui a fait découvrir le Pays Basque, du changement de vie, des décisions difficiles à prendre dans l’urgence, de celle de vivre ce rêve qui venait de loin, celui de créer des choses, des objets pas des concepts, pas du bla-bla, pas des décors en carton-pâte, afin de renaître au monde réel, après avoir touché un de ses fonds artificiels, comme la plupart d’entre nous, un jour.
Partout où se promenaient mes yeux, sur les projets en cours qui attendaient autour de son établi et sur les oeuvres abouties, tout accrochait de la beauté, de la curiosité et de l’insolite faits de cuir, de plumes, de bois ou de métal… Et là, je compris que j’étais bien face à une artiste, une vraie, un esprit brillant, un être humain capable de faire des choix suprêmes pour s’approprier son existence et sa destinée.
J’ai repensé aux textes de son site, ceux qui décrivent ses magnifiques assises et éléments de mobilier, et j’ai réalisé combien ce qu’elle créait était le reflet du feu d’artifice permanent qui agitait ses neurones multicolores, comme chaque atome des oeuvres qui s’étendaient devant moi était une sorte d’expérience de physique quantique, imaginée par Max Planck, dessinée par Pierre Soulages (beaucoup de noir ce jour-là), et mise en scène par Lewis Carroll, car son atelier semblait tout droit sorti d’Alice au Pays des Merveilles.
Alors, je lui ai serré la main, nous avons pris congé, j’ai regagné ma voiture, me suis mis au volant, et les yeux dans le vague, j’ai regretté vraiment de ne pas avoir de talent artistique, car le magnétisme artistique de Camille Piaton, la beauté de ses oeuvres, l’ambiance de son atelier, avaient fait subtilement tanguer le bateau de mes certitudes en matière d’art, de style et de création. Facile me direz vous, je n’y connais pas grand-chose…
Alors, dans un souffle, j’ai murmuré « merci » : » merci Camille, pour la leçon de création… » et j’ai souri. Il faisait beau, l’air été chaud, j’étais au Pays Basque, et tant qu’existeraient des personnes comme elle, des talents à découvrir, à distinguer et à faire connaître, la vie mériterait d’être encore longtemps vécue.
Merci donc, Camille, que ceux qui ne vous connaissent pas encore, aient le plaisir de découvrir vos œuvres et parmi les plus chanceux, de vous demander de mettre un peu de beauté, de création et de singularité dans leur vie et dans leur intérieur, voire dans leur vie intérieure.
© Franck Sallaberry pour l’Institut Pays basque Excellence / Crédit Photo : Pays basque Excellence
SA BIOGRAPHIE by VIRGINIE BARO :
Camille Piaton est née en 1980 à Alès dans le Gard.
Si ses parents avaient des emplois plutôt cérébraux (une mère infirmière en psychiatrie et un père ingénieur en informatique), ils développaient chacun une activité manuelle. Sa maman, férue de peinture, peignait des décors floraux sur des meubles suivant la méthode développée par l’Atelier Guigue. Son papa, passionné de bois, arpentait les brocantes pour acquérir des pièces qu’il restaurait. L’artiste adorait les observer à leurs ouvrages. Elle acquiert ainsi très jeune divers héritages : le goût pour la création, le travail manuel, l’apprentissage de gestes techniques, la précision ou encore la recherche de l’objet qui trouvera une nouvelle vie en passant entre ses doigts.
À cela s’ajoute une culture musicale riche : elle retient de son père la funk des années 1980 et de sa mère les paroles des chansons de Serge Reggiani. De 6 à 21 ans la créatrice est inscrite au conservatoire où elle apprend la danse classique, le solfège et le piano.
Petite, elle a peu d’amis et comble ce temps seule en écoutant de la musique, en peignant et en écrivant. Dans ce cadre libre et solitaire, son écriture est déliée et fluide ce que l’environnement scolaire lui ôte.
Elle obtient un BTS Administratif et Communication et poursuit avec le passage d’un Diplôme Européen d’Études Supérieures en Communication.
Elle cherche très longtemps le travail qui la rendra heureuse, ne pouvant imaginer exercer un métier qui ne lui plaît pas. Aussi Camille Piaton s’investit dans différentes postes et ce parallèlement.
À Paris et à 21 ans elle entame une carrière dans la restauration (elle finira directrice d’établissement), elle est également mannequin (jusqu’à ses 24 ans) et signe 4 albums de musique avec une société de production. Le formatage et la dureté du milieu ne lui permettent pas d’imposer ses textes. Un premier album sort, mais une conjoncture non favorable, ajoutée à sa frustration de ne pas pouvoir délivrer ses pensées dans ses chansons la poussent à arrêter. Plus tard, Camille Piaton choisit de se lancer seule dans la réalisation d’un album. Elle enregistre son premier album solo à 26 ans. Il est un mélange de slam et de rap à tendance comique.
À 31 ans elle stoppe la musique, les codes du milieu ne lui correspondent pas et arrête la restauration.
La peinture la suit, elle fait des expositions et vend régulièrement. Un des aspects qu’elle affectionne particulièrement dans ce domaine est l’élaboration de projets communs avec ses clients. Elle aime peindre une famille, car il s’agit de connaître leur histoire, de découvrir leurs goûts afin que la toile s’intègre au mieux à leur intérieur. La notion de décoration est déjà ancrée en elle.
Toujours en quête du travail qui la rendra heureuse, elle se lance dans la concrétisation d’un fantasme ancrée en elle depuis toujours : l’ébénisterie et le design. Elle admire la noblesse du bois, son toucher. Camille Piaton se sait précise dans le geste et fine dans les détails.
C’est par hasard qu’elle a l’opportunité de réaliser deux stages afin d’avoir une première approche du métier d’ébéniste. L’un lui permet d’étudier la menuiserie et l’autre de découvrir, à l’Atelier Guigue, la peinture à la bougie, la peinture craquelée, le faux marbre, la patine et la lasure.
En 2012, et après une sélection ardue, elle est acceptée au sein de la formation en ébénisterie pour adulte de l’École Boulle. En plus de la formation générale (une année à temps plein), elle complète ces apprentissages de 4 modules : finitions contemporaines (peinture au pistolet), finitions traditionnelles (gomme-laque, vernis au tampon), Conception Assistée par ordinateur (apprentissage des logiciels d’architecte pour designer ses meubles) et enfin la marqueterie. Ce dernier domaine lui correspond particulièrement puisque les notions de cloisonnement et de segmentation sont déjà présentes dans sa peinture. Camille Piaton acquiert une formation en histoire de l’art et du mobilier, allant de l’Égypte ancienne à Philippe Starck.
En 2013 elle obtient son CAP ébénisterie. Elle réalise ensuite un stage de deux mois dans une entreprise de menuiserie. Sur le terrain elle apprend un autre aspect du métier : l’amour des matériaux, la recherche de la bonne essence et des solutions techniques pour aboutir au rendu souhaité. La technique ne doit jamais être un frein à l’effet artistique voulu.
De 2013 à 2015, Camille Piaton se fait la main. Elle achète des meubles, les restaure et leur crée un parement. En 2015, tout en s’installant au Pays basque, elle lance son activité et intègre une couveuse d’entreprises. Elle se fait très vite remarquer par la presse locale auprès de magazines de tendances et de design. Elle obtient le Prix des Métiers d’Art du Rotary Club de Saint Jean-de-Luz et finit deuxième de ce même concours, mais au niveau régional. Cela lui vaut un espace pour le salon Ob’Art (salon de l’objet et métiers d’art) de Bordeaux en 2018.
Elle travaille actuellement pour des particuliers, des décorateurs et architectes d’intérieur.
Aujourd’hui ses parents arpentent toujours les brocantes, mais cette fois-ci pour enrichir les collections d’objets, pièces qui serviront à composer les prochains ouvrages de Camille Piaton ; une belle continuité de la culture familiale.
VOUS
Quel héros vous fascinait quand vous étiez enfant ?
Mes parents qui étaient des héros du quotidien.
L’honnêteté, le courage, l’humilité, l’écoute, le positivisme exacerbé, la bienveillance et le sens de la famille.
Quel souvenir aimeriez-vous laisser à ceux que vous aimez ?
Quelqu’un qui a ses 5 sens constamment en éveil : La vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher.
VOTRE TRAVAIL
Quel a été votre premier job dans la vie ?
Organiser une soirée caritative en faveur des femmes afghanes qui ont fuit le régime de leur pays pour survivre.
A quoi ressemble une de vos journées ?
1 kg de bonheur / 800 g de stress / 400 g de rapports humains agréables / 10 litres de carburant dans ma voiture, le tout saupoudré de franches rigolades avec mes copains d’atelier et d’une prière pour que le radar du BAB soit toujours taggé quand je roule à 70 pour arriver à l’heure à l’école.
Quelles sont les qualités professionnelles que vous appréciez ?
La rigueur voire l’obsession ;-)), le talent et l’audace
VOTRE PAYS BASQUE
Quel est votre meilleur souvenir au Pays basque ?
Les rayons du soleil traversant un sous-bois enneigé dans la forêt d’Iraty, glissant à toute vitesse sur ma luge avec mon fils, seuls au monde… le vrai luxe.
Quels sont les endroits que vous aimez fréquenter ?
La Tannerie Rémy Carriat, à Espelette avec toute l’ivresse des odeurs, des couleurs et du toucher. J’y achète mon cuir pour travailler.
Boire un Mojito et manger des couteaux au coucher du soleil en bord de mer à Guéthary.
Dîner l’hiver au restaurant Venta Gaxuxa, place du fronton à Bidart.
La rivière au pas de Rolland l’été.
À quoi ressemblerait votre Pays Basque Idéal ?
Pas besoin de le changer, il l’est déjà… idéal (même si un tout petit peu moins l’été ;-))
VOTRE QUESTION
Quelle question aimeriez vous poser si vous étiez sûr(e) d’avoir la réponse ?
Un destin écrit existe-il pour chacun de nous ?